Sur cette page, on va passer en revue les études faites sur le jeûne intermittent et son efficacité (ou plutôt inefficacité) pour maximiser la prise de muscle.
Commençons par un petit disclaimer : je vais me concentrer strictement sur la prise et perte de muscle, et pas sur les aspects bénéfiques que le jeûne intermittent a sur la santé en général. Donc merci de prendre ça en compte.
On va faire comme au collège et on va commencer avec une description de la problématique. La voici :
L’insuline, une hormone sécrétée par ton pancréas après les repas, réduit la destruction des protéines musculaires. Le problème, c’est que durant le jeûne intermittent, le taux de cette hormone baisse, vu que tu as moins de repas.
De plus, pour synthétiser du muscle, tu dois ingérer des protéines. Or, pendant un jeûne, tu n’es pas en train d’ingérer des protéines (plutôt évident).
Problématique terminée.
Mais avant qu’on rentre dans le concret, on doit définir quel type de jeûne intermittent on va analyser
Les différents types de jeûne intermittent
Parmi les 3 types de jeûne intermittent qui existent, on va analyser le type le plus commun dans le monde de la musculation : celui où tu limites la période durant laquelle tu manges pendant la journée. Typiquement, cette période pendant laquelle tu manges est limitée à 8 heures, mais certaines personnes réduisent cette fenêtre encore plus à 4 heures.
Si tu veux une petite anecdote rigolote : sais-tu pourquoi la période classique de jeûne est 8 heures ?
Les premières études sur le jeûne intermittent ont été faites sur des rats (classique). Le problème, est que les rats aiment bien cacher de la nourriture, donc pour faire en sorte les rats ne fassent pas cela, un chercheur doit constamment être présent durant les périodes d’alimentation des rats. Et le chercheur en chef, ne voulant pas que sa femme passe des journées trop longues, a défini la période d’alimentation à 8 heures. Rien de plus.
Et une fois que cette première étude a vu le jour, toutes les études qui suivent ont également pris 8 heures. Donc la durée de jeûne intermittent classique de 8 heures n’est pas fondé sur des processus physiologiques compliqués, c’est juste un nombre arbitraire.
Perso, je trouve ça plutôt drôle.
Bon assez blablaté, revenons à notre prise de muscle.
Mais avant, il va falloir que l’on couvre rapidement deux concepts : la synthèse de protéine musculaire et la dégradation (ou destruction) de protéines musculaires
Dégradation de protéine musculaire
La dégradation de prot musculaire est un processus utilisé par ton corps pour éliminer les protéines anciennes, endommagées, mutées et/ou redondantes de tes fibres musculaires. Ton corps va faire ceci en les réduisant en acides aminés, comme nous l’indique cette revue d’études.
Ces acides aminés vont ensuite être utilisés pour la synthèse de protéines musculaire ou comme carburant pour tes muscles.
Et comme on l’a vu un peu plus haut, la dégradation de protéines musculaire est majoritairement dictée par l’insuline, l’hormone que ton corps utilise pour stocker le surplus de glucose sanguin suite à un repas.
L’insuline va inhiber (=langage scientifique pour limiter/arrêter) la dégradation de protéines musculaire (étude ici).
Synthèse de protéine musculaire
La synthèse de protéine est le processus inverse. Ton corps va prendre les acides aminés libres et les « fusionner » ensemble pour créer des protéines musculaires, comme nous l’explique cette revue d’études.
Donc, comment bâtir du muscle ?
Ton corps bâti du muscle quand le taux de synthèse de protéine musculaire dépasse le taux de dégradation de protéine musculaire. C’est aussi simple que ça.
Réduire le nombre de repas – bon ou mauvais pour la prise de muscle ?
Synthèse de protéine musculaire
La synthèse de protéine, comme tu le sais peut-être déjà, est dictée principalement le taux de leucine que tu ingères. La leucine est un acide aminé essentiel (AEE). Une fois la leucine absorbée, ton corps va bâtir du muscle jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de leucine, ou plus d’acides aminés essentiels libres pour bâtir des protéines musculaires (étude).
Pour maximiser la synthèse de protéines musculaire, il faut donc ingérer de la leucine pour déclencher cette synthèse, ainsi que des acides aminés essentiels pour former les protéines musculaires.
Le pic de la synthèse de protéine arrive environ 1,5 à 3 heures après l’ingestion de protéine, mais cette synthèse va ensuite redescendre à zéro après 6 heures, même si des acides aminés et de la leucine sont toujours disponibles dans ton corps. On nomme cette redescente le « muscle full effect » ou « effet muscle plein » en français.
Cela veut dire qu’il y a une dose maximale efficace d’AAE et de leucine à ingérer. Ce qui, en français, veut dire qu’ingérer plus d’une certaine dose d’acides aminés est inutile pour la prise de muscle.
D’après cette étude et cette étude, pour maximiser la synthèse de protéine musculaire, il faut ingérer 0,25 g/kg de protéine d’une source de haute qualité pleine de leucine en un repas. Pour un homme de 70 kilos, cela revient à environ 17,5 grammes de protéine de haute qualité (ex : whey). Pour les protéines de mauvaise qualité, il faut en ingérer plus.
Note : en général, les protéines animales sont des protéines de haute qualité et les protéines végétales ne le sont pas. Et d’ailleurs, si tu veux savoir quels aliments sont de haute qualité et quels aliments ne le sont pas, lit la page que j’ai faite sur précisément le sujet.
C’est pour cela qu’ingérer des doses de protéine beaucoup plus grandes (ex : 80 g) en un repas ne va pas augmenter la synthèse de protéine musculaire autant que la même dose de protéines séparée en plusieurs repas (ex : 4 x 20 g).
Or, quand tu es en train de faire du jeûne intermittent, tu ne peux que manger pendant 4 à 8 heures de ta journée, ce qui est moins que les 16 heures que tu aurais dans une alimentation classique.
Prenons un exemple pour mieux comprendre :
Supposons que tu es homme pesant 70 kilos. Pour maximiser ta prise de muscle, tu dois ingérer environ 150 g de protéines par jour. Si tu n’as que 8 heures pour manger, et que tu fais un repas toutes les deux heures (ce qui serait beaucoup), tu ne peux manger au maximum que 4 repas. Et pour manger 150 g de protéines en 4 repas, tu dois manger environ 35 g de protéine par repas.
Or, 35 grammes, c’est plus que la dose maximale pour saturer la synthèse de protéines. Donc, une partie de toutes les protéines que tu as mangées ne vont pas être utilisés.
Alors que si tu avais 16 heures pour manger et que tu fais un repas toutes les 2 heures, tu dois manger 17,5 g de protéines par repas. Ainsi, tu vas utiliser un plus grand % de la protéine totale que tu manges pour synthétiser du muscle, ce qui va bien sûr augmenter ta prise de muscle.
Dégradation de protéines musculaires et jeûne intermittent
La dégradation des protéines musculaires, comme on l’a vu un peu plus tôt, est réduite après une sécrétion d’insuline.
Ensuite, comme le montre cette revue d’études et cette autre revue d’études, la dégradation des protéines musculaires est à son maximum quand les niveaux d’insuline sont bas.
Et les niveaux d’insulines sont à leurs minimums durant les périodes où tu ne manges pas, vu que pour sécréter de l’insuline, il faut manger des glucides ou protéines (source : revue d’études).
Pour la personne suivant une alimentation classique, c’est pendant la nuit (étude ici et là) que le taux de dégradation musculaire est à son maximum.
Mais si tu fais du jeûne intermittent, tu augmentes cette fenêtre de destruction musculaire de 8 heures minimum. Donc en gros, tu doubles la période de destruction maximale de protéine.
Note : d’après cette étude ainsi que celle-ci, peu d’insuline est nécessaire pour arrêter cette dégradation musculaire : une dose de 20/30g de protéine ou de glucides devrait suffire.
Donc le jeûne intermittent va affecter ta prise de muscle sur deux fronts :
Vu que tu fais moins de repas, tu es obligé d’ingérer des plus grandes quantités de protéine par repas, limitant les chances que les acides aminés que tu ingères soient utilisés pour la synthèse de protéine à cause de « l’effet muscle plein ». Étude et étude montrant cela.
Et vu que tes taux d’insuline restent bas plus longtemps pendant ta journée, le taux de dégradation musculaire est augmenté.
Rappel : pour construire du muscle sur le long terme, il faut que la synthèse de protéine soit plus élevée que la dégradation de protéine.
On peut conclure que le jeûne intermittent est une méthode sub-optimale pour maximiser la synthèse de protéine et la prise de muscle.
Je ne suis pas le seul à être tombé sur cette conclusion. Voici ce que les chercheurs de cette revue d’études disent sur précisément ce sujet (citation traduite en français) :
« Ainsi, sur la base des études menées jusqu’à présent, nous soutenons l’idée que la réduction de synthèse de protéine musculaire due à l’ingestion d’acides aminés moins fréquente ne peut pas être compensée par une augmentation de la taille des repas, comme cela est susceptible d’arriver en faisant un jeûne intermittent »
En d’autres mots, les chercheurs pensent que le jeûne intermittent va réduire la vitesse de prise de muscle.
Jeûne intermittent et musculation : conclusion et discussion
D’après les études que nous avons, apparemment, le jeûne intermittent est une mauvaise stratégie pour maximiser la prise de muscle. En revanche, j’aimerais bien injecter un peu de nuance.
Nuance :
La synthèse/dégradation de protéines musculaires n’est pas simplement dictée par le nombre/composition des repas. D’autres facteurs que l’on n’a pas étudié sur cette page rentrent en compte, notamment les niveaux d’hormones anaboliques comme l’hormone de croissance et la testostérone.
Sans rentrer dans les détails, le jeûne intermittent va changer les niveaux de ces dernières.
Hormone de croissance
La sécrétion d’hormone de croissance augmente quand tu jeûnes (étude ici).
De plus, les niveaux de cette dernière sont également réduits quand tu es en hyperglycémie, l’étude est ici. Or, pour être en hyperglycémie, il faut manger des glucides/sucres. Chose que tu ne peux pas faire quand tu jeûnes.
Testostérone
En jeûnant, vu que tu ne manges rien, tes niveaux d’insuline restent bas, donc ta sensibilité à l’insuline va augmenter.
Or, vu que les personnes avec une sensitivité basse à l’insuline (très commun) ont des niveaux de testostérone réduits (étude ici), jeûner pourrait être un bon outil pour augmenter la testostérone chez ces personnes-là.
Tout ça pour dire que notre analyse d’aujourd’hui, malgré le fait qu’elle soit extensive, ne couvre qu’une partie du processus de la prise de muscles.
Et, c’est sur ces sages paroles que je vais terminer cet article.
Note pour finir : le jeûne intermittent est peut-être inférieur pour bâtir du muscle, mais ce style d’alimentation est très efficace pour ceux qui cherchent à perdre du poids.
Cette page sur le jeûne intermittent pour la musculation est maintenant terminé.
Si tu veux plus d’article sur l’alimentation de ce type, consulte ma page sur l’hydrolysat de protéine et les différences protéiques entre jeûnes et personnes âgées, ou ma page sur la qualité des protéines son influence sur la prise de muscle.
Si tu veux des suppléments pour perdre du poids basé sur les études, va voir ma page sur les feuilles d’ilex paraguariensis, ou ma page sur le coleus forskohlii et la forskoline.
Si tu cherches des suppléments pas très connus pour augmenter sa testostérone de façon significative basée sur les études, va voir ma page sur le tongkat ali, le fenugrec, l’ashwagandha et akarkara
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